De Siri à Alexa, en passant par des recommandations de films sur Netflix, l’intelligence artificielle devient de plus en plus omniprésente dans nos vies quotidiennes. Depuis son lancement en novembre dernier par OpenAI, ChatGPT a fait couler beaucoup d’encre sur les possibilités de ce nouvel agent conversationnel qui aura des répercussions marquantes sur d’innombrables facettes de la vie humaine. Deux membres du corps professoral du département d’informatique de l’Université de Moncton explorent ici ces avancements récents dans ce domaine de pointe.
«De manière générale, l’intelligence artificielle est un ensemble d’algorithmes que l’on peut entrainer sur un ensemble de données à partir desquelles ils vont donner des résultats», résume le professeur Moulay Akhloufi.
Ainsi, s’il voulait développer un réseau de neurones pour reconnaitre différents animaux, il «entrainera» son algorithme à l’aide de milliers d’images de chats et de chiens. Une fois programmé, cet outil d’intelligence artificielle pourra obtenir de bons résultats et identifier un chat parmi d’autres animaux.
Cet exemple un peu simpliste est toutefois loin des prouesses de ChatGPT («chat» ou «dialogue» en anglais, alors que «GPT» signifie «Generative Pre-trained Transformer» ou «transformeur génératif pré-entraîné»). Celui-ci produit des textes qui ont ébloui le monde entier. Ce prototype génère des réponses à des questions, il complète des phrases, il écrit des articles et il peut tenir des conversations avec des personnes humaines. ChatGPT est même passé à un cheveu de réussir des examens d’entrée dans des écoles américaines de médecine et de droit.
«Avec ce modèle, les données sont massives puisque des milliards de documents ont été injectés pour l’entrainer. Comme personne humaine, nous ne pouvons pas apprendre par cœur des milliers de documents. Nous allons en oublier beaucoup et nous rappeler certaines choses. ChatGPT n’a pas cette limite», souligne-t-il.
Sa collègue Fadoua Khennou ajoute que cet outil a de plus la particularité de ne pas se fier à une seule source pour répondre comme le fait le moteur de recherche Google par exemple, qui suggère une ressource à la fois pour répondre à une interrogation quelconque. «ChatGPT va au-delà de ça pour générer sa propre réponse», précise-t-elle.
Une boite de Pandore?
Selon Wikipédia, ChatGPT a atteint plus de 100 millions de comptes enregistrés en seulement quelques semaines et, rapidement, son utilisation a soulevé de nombreuses inquiétudes et considérations éthiques. Les avancées représentées par ce prototype auront des répercussions qui vont des risques pour la cybersécurité jusqu’au plagiat, sans oublier la disparition de certains types de tâches ou carrément des emplois qui seront remplacés plus efficacement par de tels logiciels.
«Je le vois comme une arme à double tranchant. Il est vrai qu’il y a des résultats pertinents qui pourront aider dans des tâches administratives fastidieuses et rendront certains processus plus rapides. De l’autre côté, l’aspect désinformation pourrait devenir problématique lors d’élection puisque plus de gens pourront générer du contenu trompeur pour manipuler. Aussi, on peut justement s’en servir en cybersécurité pour créer des scripts rapidement pour sécuriser des systèmes, alors que certaines personnes vont l’utiliser pour des fins malveillantes», constate-t-elle.
Dans le même ordre d’idée, des personnes étudiantes pourraient se servir de ChatGPT ou d’autres outils du genre pour produire des projets en entier ou générer des réponses à certaines questions d’examen. «Nos plans de cours devront maintenant exactement définir ce qui est permis ou pas par rapport à ChatGPT et nous devrons développer de nouvelles façons d’évaluer nos étudiantes et nos étudiants», explique-t-elle.
Moulay Akhloufi ajoute de son côté que l’intelligence artificielle progresse actuellement à la vitesse grand V et que l’être humain n’a jamais été auparavant confronté par de tels avancements aussi rapides. «Je n’ai pas peur de dire qu’il faudra un certain contrôle», affirme-t-il en mentionnant que les gouvernements du monde entier devront préparer des cadres législatifs sans plus tarder.
Des avancées époustouflantes
Ce professeur d’informatique rappelle que tout outil technologique peut être utilisé de façon nuisible, mais que de telles avancées peuvent également aboutir à des résultats époustouflants. «Nous connaissons un momentum incroyable avec de nouvelles découvertes et de nouveaux avancements. L’important est de faire preuve de vigilances par rapport aux utilisations malveillantes et de pousser vers les bonnes utilisations pour rendre notre vie meilleure», affirme-t-il.
Par exemple, de futurs logiciels pourraient analyser des milliers de pages de dossiers médicaux pour aider un médecin à poser un diagnostic plus rapidement. De même, de l’intelligence artificielle pourrait effectuer un premier tri parmi des milliers de radiographies pour détecter les tumeurs qui seraient ensuite confirmées par une personne spécialiste en radiologie.
« En médecine de précision, on sait que chaque individu est différent dépendamment de la génétique de la personne. Certains médicaments pour le cancer peuvent fonctionner pour une personne, mais pas pour une autre en raison de la génétique. Des outils d’intelligence artificielle pourraient aider à développer des traitements plus personnalisés et donc plus efficaces », mentionne-t-il.
Moulay Akhloufi et Fadoua Khennou croient tous les deux que les avancées liées à ChatGPT n’en sont qu’à leurs premiers balbutiements et que de grands changements de société sont à venir. Les applications d’intelligence artificielle toucheront rapidement une foule de domaines aussi variés que les systèmes bancaires, les assurances, les réponses aux changements climatiques, le marketing et bien d’autres. «L’être humain sera toujours là et l’intelligence artificielle sera là pour nous aider», conclut Mme Khennou.
Un microprogramme en intelligence artificielle offert à l’Université de Moncton
L’Université de Moncton offre un microgramme dans le domaine de l'intelligence artificielle pour acquérir une spécialisation. Ce microprogramme a pour but d'offrir une formation en intelligence artificielle destinée essentiellement aux personnes qui sont déjà sur le marché du travail.
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