La langue dans mes sciences, c’est 5E
L'objectif fondamental de ce projet est rendre compte de l'impact sur l'apprentissage des sciences et des langues que peuvent avoir des pratiques pédagogiques qui intègrent le cycle de l'apprentissage et les stratégies langagières. Pour ce faire, une communauté d'apprentissage professionnel (CAP), c’est-à-dire une équipe collaborative qui planifie collectivement l’action, comprenant des enseignants de sciences 6e, 7e et 8e année et des didacticiennes en sciences et en langue a été mise sur pied afin de cheminer vers de meilleures pratiques pédagogiques, en visant que celles-ci aient un impact sur le rendement des élèves. La CAP servira à construire et comprendre comment mettre en œuvre ces pratiques pédagogiques novatrices. Ce projet s'ancre dans 1) la mobilisation de chercheures et de praticiens pour la mise en œuvre d'un modèle de formation continu viable cheminant vers des pratiques gagnantes; 2) le développement de ces pratiques selon un cadre théorique qui inclut l'enseignement et la pratique du processus d'enquête et l'intégration de stratégies langagières en sciences; 3) la mise à l'essai de ces pratiques pédagogiques et la vérification de leur impact sur diverses composantes de l'apprentissage. Pour y arriver, une étude de méthodologie mixte sera effectuée. D'abord, dans un volet qualitatif, les enseignants rendront compte de leurs expériences, défis et cheminement dans leurs pratiques pédagogiques en raison de leur participation à la CAP. Ensuite, dans un schème quantitatif quasi-expérimental longitudinal, les apprentissages et la motivation des élèves des classes de ces enseignants seront mesurés afin de vérifier l'impact de la participation à la CAP de leurs enseignants sur les élèves. Les élèves seront suivis durant trois ans afin d'assurer de voir les retombées de ce projet à long terme.
Les mots pour grandir : La francisation en contexte francophone minoritaire
Dans la mise en œuvre de sa mission « double », l’école française en milieu minoritaire est devenue « l’institution la plus importante pour la survie de la minorité linguistique officielle» (Arsenault-Cameron, 2000). Cependant, cette institution publique est également aux prises avec de nombreux enjeux sociodémographiques qui font en sorte que le nombre d’élèves admissibles à l’école de la minorité diminue progressivement et un enfant admissible sur deux n’a pas le français comme langue maternelle (Landry, 2010). Qui plus est, environ la moitié des enfants admissibles à l’école française ne la fréquente pas (Corbeil, Grenier et Lafrenière, 2007). Or, les écoles françaises souhaitent maximiser la participation des enfants admissibles, ainsi que d’autres, ce qui se traduit en une diversité culturelle et linguistique grandissante dans les écoles (Cormier, 2015; Farmer, 2008). Afin de répondre aux besoins variés des élèves en matière de développement linguistique, les écoles françaises mettent sur pied des programmes de francisation qui vise l’acquisition des habiletés langagières nécessaires pour entreprendre des études dans une école française. En dépit du fait que ces programmes existent dans les écoles depuis les années quatre-vingt (CMEC, 2002), nous en savons très peu sur le processus de francisation en contexte minoritaire (Cormier, 2014). Or, la présence des élèves anglo-dominants dans les écoles françaises est assujettie aux interprétations et aux opinions variées. Une supposition répandue avance l’idée que les élèves anglo-dominants risquent « d’angliciser l’école et de menacer l’espace homogène francophone que l’on souhaite mettre en place pour contrebalancer l’anglodominance du milieu » (Cormier et Lowe, 2013, p. 227). Il s’avère essentiel, alors, d’observer et de comprendre les interactions entre la langue minoritaire et la langue majoritaire dans les pratiques langagières des élèves au sein des classes composées d’élèves francophones et d’élèves en besoin de francisation. Les questions issues de cette recherche sont : 1) Comment se manifestent les interactions sociales des enfants dans une classe de maternelle lors des jeux libres? 2) Dans quelle langue se passent ces interactions? 3) Quelles négociations font les élèves pour déterminer la langue de l’interaction? 4) Quelle est la fréquence des interactions en français et en anglais? 5) Voit-on des influences du contexte scolaire? 6) Constate-t-on un changement entre les deux temps d’observation?
La lecture en contexte linguistique minoritaire. Comment expliquer les résultats.
De nombreuses recherches montrent que réussite et motivation en lecture sont corrélées (Gambrell et Gillis, 2007; Wigfield, Eccles, Schiefele, Roeser et Davis-Kean, 2006). Les lecteurs motivés et engagés lisent davantage et ainsi, en raison de ce comportement, développent leurs compétences en lecture et donc réussissent mieux en lecture (Stanovich, 1986). Sur ce plan, l’influence familiale est très importante. Par leurs choix et leurs activités, les parents peuvent modeler et promouvoir la lecture et ainsi favoriser la motivation et la réussite en lecture chez leurs enfants. Ce faisant, en exposant leurs enfants aux livres, en leur faisant la lecture de nombreux livres, en développant leur lexique et en engageant des conversations au sujet des lectures, les parents peuvent créer un vécu littératié qui influencera positivement la motivation et conséquemment, les compétences en lecture de leurs enfants (Giasson, 2011; Grolnick et al., 1997; Rodriguez et al., 2009).
D’après, les théories de l’interdépendance des langues et du seuil de compétences minimales de Cummins (2000), selon laquelle les compétences de la langue maternelle se transfèrent à la langue seconde, à condition que l’individu ait développé un seuil de compétence minimal dans sa langue maternelle, nous supposons donc que les compétences en lecture, qui sont tributaires des compétences langagières et du degré d’éveil à l’écrit (Giasson, 2011), se transfèreront bien d’une langue à l’autre si le contexte familial promeut le développement minimal de compétences littératiées. Les écrits au sujet du bilinguisme en jeune âge, soit précoce ou consécutif (Baker, 2011), du plurilinguisme (Moore, 2006), des plurilittératies (Kalantzis et Cope, 2012) abondent dans le même sens en précisant que les personnes bilingues développent des compétences qui se transposent d’une langue à l’autre. Les écarts dans les résultats en lecture pourraient donc s’expliquer par un manque de vécu littératié et de motivation en lecture plutôt que par le contexte linguistique minoritaire.
Cette recherche présente différentes variables : 1) motivation en lecture, 2) vécu littératié, 3) vécu langagier, 4) compétence en lecture et 5) contexte langagier. Pour mesurer (1) la motivation en lecture, nous avons utilisé un questionnaire, inspiré de la théorie de la motivation intrinsèque et qui mesure un continuum entre l’amotivation et la motivation intrinsèque (Deci et Ryan, 2000). Dans ce questionnaire, nous avons inclus des sections qui mesurent (2) le vécu littératié (combien de livres as-tu à la maison, qui vois-tu lire à la maison; etc.) et (3) le vécu langagier (quel est ta langue maternelle? Tu parles quelle langue avec ton père, ta mère? Etc. ). Nous avons mesuré la (4) compétence en lecture en obtenant les résultats des élèves, en lecture, au test du ministère qui est administré à la fin de la cinquième année. Pour (5) le contexte linguistique, nous avons recueilli des données dans une variété de contextes linguistiques au Nouveau-Brunswick, avec certaines localités ayant un pourcentage de francophones de moins de 5 %, d’autres s’affichant aux alentours du 30 % et encore d’autres frisant le 100 %.
Nous avons ainsi distribué les questionnaires dans 9 différentes écoles (22 classes) et nous avons environ 230 répondants, tous en cinquième année.
Avec ces différentes mesures, nous prévoyons faire des analyses de corrélations et des analyses par modèles d’équations structurelles. L’analyse par modèle d’équations structurelles permettra de vérifier toutes les corrélations dans un même test.