Le Prisme - Décembre 2017 No17 - page 4

Décembre 2017 No 17
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Les mitochondries, piliers du
métabolisme et de l’adaptation
au stress
Lorsque l’organisme est soumis à
un stress, qu’il soit d’ordre cellulaire
ou environnemental, plusieurs
ajustements ont lieu dans la cellule
afin de promouvoir la survie de la
cellule. Au centre de ces ajustements
se trouvent les mitochondries : de
petites organelles à l’intérieur du
cytoplasme des cellules.
Les mitochondries, considérées comme
les usines de la cellule, sont extrêmement
importantes car elles permettent non
seulement de convertir les nutriments
provenant de l’alimentation en énergie
(l’ATP) grâce à la consommation
d’oxygène, mais sont aussi impliquées
dans d’autres processus essentiels tels
que la mort cellulaire (apoptose), le
vieillissement, la synthèse des lipides ainsi
que dans d’autres voies métaboliques.
Bien que les mitochondries soient
connues depuis longtemps, leur
fonctionnement reste un sujet d’actualité
car des dysfonctions mitochondriales
sont généralement associées à plusieurs
maladies telles que le cancer, les maladies
neurodégénératives et le diabète de
type 2. De plus, elles sont au centre
de la théorie du vieillissement car elles
sont les principales productrices des
espèces réactives de l’oxygène, de petites
molécules qui attaquent les différents
composants cellulaires et seraient à
l’origine du vieillissement.
Le professeur Nicolas Pichaud du
Département de chimie et biochimie
et son équipe s’intéressent à la capacité
qu’ont les mitochondries à ajuster leurs
fonctions et, de ce fait, à adapter le
métabolisme des cellules à différentes
conditions. Pour ce faire, ils travaillent
avec un modèle animal particulier,
la mouche à fruit (Drosophila
melanogaster).
En effet, ces animaux, de manière
surprenante, possèdent des organes
métaboliques équivalents à ceux retrouvés
chez les humains, avec notamment un
cœur, des cellules hépatiques équivalentes
au foie, des corps gras représentant le
tissu adipeux, des muscles, etc. De plus,
les mécanismes métaboliques sont aussi
similaires à l’humain. Un autre avantage
de ce modèle est qu’il peut être facilement
modifié génétiquement pour simuler
une maladie spécifique et a une durée
de vie assez courte (environ 70 jours)
pour pouvoir de manière précise étudier
le vieillissement. Cependant, très peu
d’équipes de recherche dans le monde
tirent avantage de tous ces bénéfices
en étudiant les mitochondries de ces
organismes lorsqu’ils sont exposés à des
stress environnementaux ou cellulaires.
Lorsque nous mangeons, les sucres,
lipides et protéines vont être assimilés
par l’organisme et vont être transformés
en différents substrats au niveau de la
cellule. Ces substrats vont ensuite pouvoir
rentrer dans les mitochondries grâce à des
transporteurs, et vont être de nouveau
transformés par les enzymes se trouvant
dans les mitochondries, permettant
ainsi de les convertir en énergie grâce à
la respiration cellulaire. Cependant, lors
d’un changement d’alimentation, cette
conversion d’énergie va être modifiée et
les différents processus cellulaires vont
s’ajuster en conséquence.
Par exemple, lors d’une alimentation
riche en lipides chez la mouche à fruit,
le fonctionnement des mitochondries
va augmenter au bout de deux jours.
Au bout de quatre jours cependant, des
dysfonctions apparaissent et les mouches
présentent alors tous les symptômes
associés au diabète de type 2. Ainsi, il est
possible d’aller voir à quel niveau précis
le métabolisme commence à défaillir,
c’est-à-dire quelle protéine (transporteur
de substrat ou enzyme mitochondriale)
est la première à être affectée et serait
donc en partie responsable de l’apparition
de la maladie. L’identification de ces
protéines apporterait ainsi de potentielles
cibles thérapeutiques qui pourraient être
modulées afin de contrer les effets du
diabète de type 2.
En résumé, les mitochondries sont
un peu le problème et la solution à
toutes sortes de maladies et de stress
environnementaux : si elles arrivent à
s’adapter aux changements de conditions,
alors l’organisme a de grandes chances
de survivre, mais si ces changements
sont trop drastiques et prolongés, alors
les mitochondries vont commencer à
être dysfonctionnelles et vont entraîner
l’apparition de nombreuses maladies.
En travaillant à maintenir les fonctions
mitochondriales grâce à des interventions
génétiques ou pharmacologiques, il serait
alors possible de retarder l’apparition
de plusieurs maladies. En travaillant
sur les mouches à fruit, des résultats
sur cette problématique peuvent être
générés rapidement et les mécanismes
métaboliques peuvent être identifiés de
manière précise, mais doivent quand
même être confirmés sur le long terme
grâce à d’autres modèles!
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